lundi 17 décembre 2007

Dites du mal de la psychanalyse, il en restera toujours quelque chose...


Jusqu'au bout j'ai lu "L'élégance du hérisson";, second "roman" (?) de Muriel Barbery

Ayant récupéré tout le calme nécessaire pour en parler sans excès inutile je dirai que ce livre est un bel exemple de ce que n'est pas (ou ne devrait jamais être) la littérature : un gâchis hâtif de talent.

N'ayant pas lu le précédent récit de M. Barbery, je ne puis que supposer qu'elle a été victime d'un succès trop facile, trop précoce ?

Je n'ai jamais donné ( dans des supports publics) dans la critique négative, féroce ou pas et si j'écris ce billet c'est parce que j'avais d'abord été séduit par une certaine fraîcheur d'écriture chez cet encore jeune auteur et que je l'avais conseillé à quelques amis.C'est donc afin d'amender un avis d'abord favorable.

Au fil des pages les soupçons se sont transformés en certitudes. Cet écrivant, sans doute doué, accumule les travers. Comme si l'inspiration venait à défaillir, le texte vient à hésiter entre le conte philosophique, le roman ou l'essai. D'un pas désormais malhabile l'intrigue déambule, enfant aux premiers temps de la marche ou homme ennivré, c'est comme l'on voudra.

Le plus grave est sans doute d'utiliser sans précaution un style précieux aussi inutile qu'inadapté. Afin de souligner le contraste entre l'apparence du personnage principal et les trésors de délicatesse qu'il recèle l'auteur a choisi de lui faire tenir des propos recherchés, un tantinet maniérés. Le procédé d'abord comique devient vite très indigeste.

Le second travers est de verser dans le moratoire moral le plus accablant : "Tous des cons et des salauds sauf moi et ceux que j'aime". Il y a du Robespierre dans ces harangues contre la connerie. Et c'est ainsi que de la sympathique critique nous glissons vers le réquisitoire.

Le troisième est d'avoir complètement bâclé les personnages principaux qui, du coup, naviguent, effigies inconsistantes, dans des limbes narratives aussi improbables qu'eux.

Quel génie de conteur n'aurait-il pas fallu, d'ailleurs, pour dresser en si peu de pages une intrigue acceptable entre des personnages si nombreux. Reconnaissons une aisance à imaginer qui n'est cependant rien sans le travail nécessaire à l'incarnation crédible.

Le quatrième est d'avoir abusé jusqu'à l'impudeur du terme "intelligent", gaucherie que je retrouve, hélas, dans un petit essai où il est plus logique mais pas pour autant excusable : "La bêtise s'améliore" de C. Cannone dont j'avais beaucoup apprécié les propos sur FQ. Dommage.

Muriel Barbery s'est crue obligée de multiplier les charges contre la psychanalyse au travers des mœurs qui justement n'ont pas grand chose à voir avec elle. Si ce n'était si banal il serait presque comique de constater qu'une si ardente recherche d'originalité sombre dans une critique aussi niaise, caricaturale que banale.
La justesse des remarques plutôt acides faites l' encontre d'un praticien pervers enlisé dans son confort, ont le très grave inconvénient de valoir comme des généralisations abusives comme celles sur lesquelles s'est écrit le bien trop fameux livre noir.

Je crains que ce ne soit l'une des raisons de son succès ....

Bref je suis sidéré que "Le prix des libraires " ait été accordé à un ouvrage aussi mauvais.

Alain Dufour

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