lundi 17 décembre 2007

de l'hélicon...

Dites du mal de la psychanalyse, il en restera toujours quelque chose...


Jusqu'au bout j'ai lu "L'élégance du hérisson";, second "roman" (?) de Muriel Barbery

Ayant récupéré tout le calme nécessaire pour en parler sans excès inutile je dirai que ce livre est un bel exemple de ce que n'est pas (ou ne devrait jamais être) la littérature : un gâchis hâtif de talent.

N'ayant pas lu le précédent récit de M. Barbery, je ne puis que supposer qu'elle a été victime d'un succès trop facile, trop précoce ?

Je n'ai jamais donné ( dans des supports publics) dans la critique négative, féroce ou pas et si j'écris ce billet c'est parce que j'avais d'abord été séduit par une certaine fraîcheur d'écriture chez cet encore jeune auteur et que je l'avais conseillé à quelques amis.C'est donc afin d'amender un avis d'abord favorable.

Au fil des pages les soupçons se sont transformés en certitudes. Cet écrivant, sans doute doué, accumule les travers. Comme si l'inspiration venait à défaillir, le texte vient à hésiter entre le conte philosophique, le roman ou l'essai. D'un pas désormais malhabile l'intrigue déambule, enfant aux premiers temps de la marche ou homme ennivré, c'est comme l'on voudra.

Le plus grave est sans doute d'utiliser sans précaution un style précieux aussi inutile qu'inadapté. Afin de souligner le contraste entre l'apparence du personnage principal et les trésors de délicatesse qu'il recèle l'auteur a choisi de lui faire tenir des propos recherchés, un tantinet maniérés. Le procédé d'abord comique devient vite très indigeste.

Le second travers est de verser dans le moratoire moral le plus accablant : "Tous des cons et des salauds sauf moi et ceux que j'aime". Il y a du Robespierre dans ces harangues contre la connerie. Et c'est ainsi que de la sympathique critique nous glissons vers le réquisitoire.

Le troisième est d'avoir complètement bâclé les personnages principaux qui, du coup, naviguent, effigies inconsistantes, dans des limbes narratives aussi improbables qu'eux.

Quel génie de conteur n'aurait-il pas fallu, d'ailleurs, pour dresser en si peu de pages une intrigue acceptable entre des personnages si nombreux. Reconnaissons une aisance à imaginer qui n'est cependant rien sans le travail nécessaire à l'incarnation crédible.

Le quatrième est d'avoir abusé jusqu'à l'impudeur du terme "intelligent", gaucherie que je retrouve, hélas, dans un petit essai où il est plus logique mais pas pour autant excusable : "La bêtise s'améliore" de C. Cannone dont j'avais beaucoup apprécié les propos sur FQ. Dommage.

Muriel Barbery s'est crue obligée de multiplier les charges contre la psychanalyse au travers des mœurs qui justement n'ont pas grand chose à voir avec elle. Si ce n'était si banal il serait presque comique de constater qu'une si ardente recherche d'originalité sombre dans une critique aussi niaise, caricaturale que banale.
La justesse des remarques plutôt acides faites l' encontre d'un praticien pervers enlisé dans son confort, ont le très grave inconvénient de valoir comme des généralisations abusives comme celles sur lesquelles s'est écrit le bien trop fameux livre noir.

Je crains que ce ne soit l'une des raisons de son succès ....

Bref je suis sidéré que "Le prix des libraires " ait été accordé à un ouvrage aussi mauvais.

Alain Dufour

dimanche 16 décembre 2007

tuba basse

Le Noël du père. (conte)

À toutes celles

et tous ceux

qui m'ont raconté des histoires,

à commencer par ma mère.

Et à Romane,

avec ses jumelles

en bouteilles de lait.


Il était une fois un petit Noël dont le père louchait et avait de très grandes dents. Tous ses copains à l'école se fichaient d'eux, vous pensez bien. « Tu as ta louche, Noël », qu'ils lui glissaient quand son père venait le chercher devant la porte. « Ratiche Lapin est venu chercher son petit Noël », qu'ils disaient dès qu'il se mettait à neiger. En effet comme si ça ne suffisait pas d'avoir de grandes dents, (ce qu'ils avaient tous plus ou moins dans la famille Lapin), les Lapin s'appelaient Lapin, alors avec les ratiches, on ne les loupait pas non plus. Comme si s'appeler Lapin vous montait aux dents! Et ça y allait, « Monsieur Karott, où as-tu mis tes fanes ? », -dès qu'il se faisait couper les cheveux.



Bon, ça allait comme ça allait, on avait l'habitude chez les Lapin de mettre son anxiété en cage et le petit Noël à son papa ne se mettait pas en colère. Il pensait que ça s'arrangerait au collège, ce en quoi il se trompait lourdement, juste les thèmes qui avaient changé. Après que le professeur de français leur eut fait lire « le passe-muraille » de Marcel Aymé, ils le charriaient en lui glissant « garenne, garenne, poil de laine », chaque fois qu'il rentrait dans une classe ou qu'il en sortait. Enfin bref le petit Noël en avait quand même marre, il cherchait sa voie.



Un soir de décembre alors qu'il faisait ses achats avec son papounet, qui s'était laissé pousser la barbe et s'habillait en rouge pour qu'on ne le remarque pas, alors qu'ils étaient tous les deux déjà bien chargés, les bras pleins de cadeaux, le petit Noël devenu un peu grand laissa son papa cinq minutes à la porte d'un magasin pour aller chercher le dernier cadeau, le cadeau de Noël à son papa.





Le papa de Noël il était harassé, heureusement, il y avait une chaise devant le magasin, alors, il s'assied avec ses cadeaux dans leurs sachets platiques qu'il pose par terre, enfin sur le goudron, quoi. Et là, ni une ni deux, un tout petit enfant très pauvre mais bien propre et mignon parce que ses parents l'aimaient bien, le voit, il ne parlait pas très bien encore, il reconnaît le père caché sous la barbe et ses habits rouge homard, et crie en le montrant du doigt, « papa Noël, père Noël! ». Monsieur Lapin qui s'appelait Marcel, Marcel Lapin, très embêté, déjà tout rouge dans ses habits rouge homard rougit encore dans sa barbe blanche, attrappe le petit Nicolas, (eh oui, c'était le petit Nicolas de Sempé, ce n'est pas tellement vieux cette histoire), il le pose sur ses genoux, plonge la main dans un sac plastique, saisit un paquet et le lui refile en disant « tiens, tiens, prend ça », il lui donne un cadeau, peut-être pas le plus beau mais enfin un cadeau pas mal, quand même.


Et le petit gars, là, tout content, regarde sa mère qui lui sourit, regarde son père qui rigole franchement, regarde le père de Noël, lui encore très rouge mais se croyant tiré d'affaire, mais c'est là que le petit Nicolas et ses parents se mettent à crier pas du tout discrètement, « Merci, père de Noël, merci papa d'Noël ! ». Et puis voilà, vous connaissez la suite : il y a un gars à côté d'eux qui s'en mêle et qui commence à chanter « petit papa d'Noël, quand tu descendras du ciel », complètement à côté de ses pompes.


Et bien voilà, vous connaissez maintenent toute l'histoire de Noël, comment ça a commencé toute cette folie au milieu de la fête des Lumières. Ce fut le premier Noël du père de Noël. Et quand Noël sortit enfin du magasin, tout le monde s'exclama, « Noël, c'est Noël, on va acheter un Lapin de Noël ! ». Comme dit LLV, voili voilà.


Didier Kuntz

15/12/07

mardi 11 décembre 2007

anthologie de la psychanalyse buvard-desencre n°1 cover

l'anthologie de la psychanalyse n° 1 de Buvard & Désencré est diponible!

chers amis,

l'anthologie de la psychanalyse n° 1 de Buvard & Désencré est diponible!

on peut la voir à cette adresse

http://www.lulu.com/content/1661836

la table des matières se trouve en quatrième de couverture

j'en ai commandé cinq exemplaires parce que malheureusement... et je les aurais je pense dans trois semaines; vous verrez, c'est un joli format, 21.56 x 21.56 cm; le même que celui de l'essentiel underground papers, qui est cher parce qu'en couleur et deux fois le nombre de pages; alors que là c'est en noir et blanc, 88 pages, ce qui explique le prix vraiment plancher; offrez les à vos amis comme je compte le faire, si l'initiative du papier vous plaît... Le blog continue de toutes façons... Je pense que c'est avec ce genre de choses qu'on arrivera à inscrire la psychanalyse autrement dans la culture d'aujourd'hui... Un pas de côté vers la luxure?

Bien à vous tous,

Didier

encore une production des éditions des branas!

ps: pour ceux qui n'ont pas encore écrit chez Buvard & Désencré, c'est un appel du pied, mais enfin, mais enfin, vous croyez que ça va être Noël si c'est pas Byzance pendant la fête des Lumières?

lundi 10 décembre 2007

urbain



dimanche 9 décembre 2007

Le lieu se prêtait à la découverte.

Le lieu se prêtait à la découverte.

Une pièce assez modeste dont l'unique et haute fenêtre s'ouvre sur le ciel. C'est le 20° étage d'une tour en plein Paris.

J'aimais, j'étais aimé.

A ce moment de la matinée je lisais, studieux, un texte psychanalytique, probablement un séminaire de Jacques Lacan, peut-être bien, "Le désir et son interprétation" . J'étais seul dans l'appartement.

Mon amie m'avait un peu entrouvert des espaces sonores que je ne connaissais pas. J'en connaissais d'ailleurs bien peu. Mais avec patience et enthousiasme elle m'avait amené à écouter des voix, le clavecin, le piano parfois. Je la suivais avec confiance, sa joie était communicative.

Cependant il m'était toujours impossible de me consacrer à l'écoute : il me fallait toujours m'occuper à autre chose, au moins savourer des pensées, je veux dire des phrases pensées. Je n'avais reçu aucune éducation musicale et dans mon enfance mes proches n'écoutaient jamais le moindre morceau. Curieux d'ailleurs puisque mon père passait pour avoir une bien jolie voix de ténor et ma mère s'amusait beaucoup à chanter Piaf, Trénet, Guy Béart , Luis Marianno, Tino Rossi etc. Chansons et pièces policières mais jamais de musique seule.

En somme la musique, si elle m'était plaisante, demeurait une sorte de parfum frivole, les senteurs légères d'une prairie, rien qui justifiât jamais le suspens de la marche. J'avançais.

Et ainsi cet matin là, je me plaisais à creuser le texte, à en labourer avec vaillance les hypothèses innombrables. Elle m'avait dit : " Tu peux mettre de la musique, tu sais" en partant au travail.

Bien installé dans le canapé je dégustais tous ces bonheurs, le ciel rare de Paris, la voix encore présente de la femme que j'aimais et l'excitation que le texte engendrait.

Tandis que le piano jouait je restais concentré sur les méandres complexes de cette pensée parlée. Mais bientôt j'éprouvais une gêne étrange et je ne parvenais plus à réfléchir.

Je conçus que c'était la musique qui m'empêchait.

Je relevais la tête, je mis le livre sur mes genoux, je reposais bloc note et stylo. Qu'était-ce que cela ?

Les notes s'égrenaient avec lenteur, comme retenues dans les mains du pianiste, qui les délivraient goutte à goutte.

J'étais gagné par un sentiment inédit, étrange: il semblait que les phrases musicales en se développant n'effaçaient pas les précédentes, mais les prolongeaient, même, chaque note semblait dotée d'une personnalité particulière. La cadence très lente d'abord montait dans une gradation d'une incroyable délicatesse.

Je crois que l'image d'une cascade m'accompagnait incessamment. Une cascade presque immobile d'abord, toute petite aussi. Et selon les flux elle grandissait, devenait immense, ses eaux blanchies allant parfois jusqu'à la fureur. Et puis de nouveau ce tintement si fragile, si sensuel, qui m'arrache encore aujourd'hui des frissons seulement en y pensant, cette pulpe des doigts effleurant le clavier avec une douceur qui me stupéfiait.

Maintenant j'étais entièrement immergé dans le son, une matière aussi épaisse et sans limites que celle de la Méditérannée de mon enfance. Les "Variations Goldberg" se succédaient et avec elles les découvertes.
Cela se produisit d'abord dans un moment assez lent : une impression très charnelle me gagna. Il me semblait que le musicien, et l'instrument s'emmêlaient non pas selon une image triviale mais vraiment comme si surgissait de l'armoire un être mythologique, un Centaure indistinct où Glenn Gould et son piano ne faisaient qu'un.

Et je ressentais la présence du piano comme celle d'une masse vivante. Puissante, dangereuse pourquoi pas ?

Un merveilleux roman, "Métro pour l'enfer" de Vladimir Volkoff , m'avait suggéré autrefois cette intrication : un violoncelliste, nouvel Orphée, dans son étreinte avec son instrument parvenait à retenir la férocité des Enfers.

Et ce que la littérature m'avait ainsi indiqué se trouvait maintenant pleinement réalisé.

Je n'ai jamais poussé assez loin les études mathématiques pour connaître l'expérience que m'ont relatée certains amis, savants chercheurs, lorsqu'ils émergent dans des domaines inexplorés. Je tends à penser que c'est quelque chose d'assez comparable que j'ai vécu ce jour là, indissolublement lié à une femme à qui je dédie ces lignes et à Bach qui me fut révélé ce jour là.

Louis Friza

dimanche 2 décembre 2007

bleu blanc rouge

Décroissance

Quand même ils ont de curieuses manières à "La décroissance". Non?
Comment veux-tu que les psy ne passent pas pour de vieux ringards si on tord leurs propos ainsi sans les prévenir ?

Alain

Début du message réexpédié :
De : Alain Dufour
Date : 2 décembre 2007 10:32:00 HNEC
À : Redaction la Décroissance <redaction@ladecroissance.net>
Objet : gravitation

Chère Madame,
J'ai bien reçu le journal et je vous en remercie.
Cependant je suis amené à vous faire une remarque qui n'est pas pur pinaillage.
J'avais écrit dans l'article : "ou en assurer une gestion épicurienne, cas des plus rares et souvent compliquée d'une donnée pas commode, la perversion." qui a été remplacé par : "soit la gérer de façon épicurienne , cas plus rare et souvent aggravé par une tendance à la perversion"


Bien volontiers je vous concède que ma formule manquait de clarté et méritait d'être amendée. Cependant en indiquant "aggravé par une tendance à " vous m'imputez une idée que je n'ai pas exprimé. Vous savez bien comment certains mots sont d'un usage délicat.
Et perversion fait partie de ceux là. Néanmoins comme psychanalyste, je ne puis à cet endroit, partager l'opinion commune. Je n'ai pas dit que la perversion était plus grave que la névrose ! J'ai écrit "compliquée", ce n'est pas la même chose.
De surcroît point de vue civique et moral il est erroné de confondre perversion et canaillerie, elle toujours condamnable. Or la phrase imprimée est ambigüe à cet égard.
Bref il y aurait beaucoup à dire sur ce difficile problème et je m'excuse de ne pas avoir su trouver un énoncé plus clair. Je ne réclame aucune rectification mais simplement de me demander mon avis si, dans l'avenir, se présentait un cas analogue.
`
Je ne vous reproche rien car j'imagine simplement que vous n'avez pas mesuré l'impact de cette différence pour un professionnel. Mais vous admettrez que notre responsabilité de rédacteur est parfois très engagée dans le choix des mots et c'est bien le cas ici quand on sait à quels errements l'actualité donne lieu en matière de perversion.
Bien à vous
A. Dufour


Le 23 nov. 07 à 14:04, Redaction la Décroissance a écrit :
Bonjour,
quelle est votre adresse postale pour vous envoyer le journal ?
Sophie Divry
Le 30 oct. 07 à 18:56, Alain Dufour a écrit :
Comme le traitement de texte n'a pas fait son boulot j'ai repris les quelques lignes.
Voici donc une version amendée pour l'orthographe et la grammaire. Il n'est pas "interdit" de commettre des fautes mais quand même...
Avec mes excuses
Bonne soirée

Alain Dufour


"Jusqu'où interdire ?" est une question pleine de malice.
D'abord parce que ce à quoi nous sommes confrontés férocement aujourd'hui est bien plutôt de savoir "Jusqu'où ne PAS interdire ? " .
Cela au moins dans les contrées dont les valeurs traditionnelles sont rejetées par principe. Autrement dit une très large partie du monde occidental mais encore nombre de celles qui en suivent l'exemple.
Ensuite parce que poser la question de l'interdit convoque tant de disciplines (en vrac anthropologie, morale, religion, philosophie, éducation, justice, police, politique, grammaire, j'en passe et des meilleures) que nous sommes à peu près assurés de la plus parfaite cacophonie.
Cependant pour ne pas me défiler je tâcherai de répondre d'une place suffisamment précise : un psychanalyste ayant une longue et large fréquentation des addictions et plus particulièrement des toxicomanies. Ce qu'elle m'a enseigné est clinique, relève de l'observation et du décryptage. Cet enseignement est à la fois simple, déroutant et parfaitement en accord avec les découvertes de Freud.
Simple puisque les sujets , c'est à dire nous tous, face à une source de jouissance telle que la drogue (mais ce peut être le jeu, le travail, le sexe etc) optons pour l'une des deux solutions suivantes : en devenir l'esclave, ce qui est l'immense majorité des cas rencontrés, ou en assurer une gestion épicurienne, cas des plus rares et souvent compliquée d'une donnée pas commode, la perversion.
Déroutante puisque les personnes bien souvent raisonnables qui se sont apercues que les inconvénients l'emportaient de loin sur les satisfactions ne persistent pas moins dans leur néfaste passion.
Freud depuis longtemps avait constaté le masochisme primordial, fondamental au principe de l'activité humaine. En son temps (ce n'est plus de mise aujourd'hui) il avait caractérisé le Surmoi comme une instance, une sorte d'autorité intérieure qui venait rappeler à l'ordre, interdire voire persécuter l'individu. Et n'est-ce pas cela qui est à l'œuvre quand malgé toutes les désillusions, toutes les vicissitudes, toutes les réprimandes et sanctions, celui ou celle qui est pris dans les rêts d'une habitude ravageante persiste encore ?
La sorte de calcul, d'économie de son activité en vient peu à peu à se réduire à une répétition assommante où satisfaction, apaisement et sanction sont indissolublement liés.
Autrement dit l'absence ou la défaillance, le contournement, la transgression de l'interdit a pour résultat son intégration son « 'intériorisation » dans le jargon psychologique, et cela sous une forme particulièrement sauvage, intraitable, carnivore.
Cette configuration existe depuis toujours mais elle se trouve aujourd'hui étrangement encouragée par une injonction incessante que je me permets de traduire ainsi : « Soyez un bon citoyen, jouissez, jouissez et consommez. Achetez, travaillez, baisez...un trésor est caché ». A quoi s'ajoute une forte recommandation : « Cultivez votre originalité, soyez un « JE » majuscule, nous avons ce qu'il vous faut pour y parvenir »
Je ne sais plus qui affirmait qu'il valait mieux un mauvais maître que pas de maître du tout. Il me semble qu'il en va souvent ainsi de l'interdit. Par essence il sera bancal, insatisfaisant, il donnera lieu à des sentiments d'iniquité et suscitera la révolte mais convenons qu'il vaudra mieux que celui fomenté en lui même par un citoyen égaré ou celui que lui imposera le retour du tyran.

Alain Dufour


Alain Dufour


Alain Dufour

et éthique.

Science et éthique



Dans le cadre de la Commission programmatique ONG-UNESCO “SCIENCE ET ÉTHIQUE” (Groupe de Travail “bioéthique et génome humain) on m’a demandé de répondre à la question suivante, c’était en janvier 2000:

Selon l’expression de Mme Noëlle Lenoir, “l’homme n’est pas qu’un animal programmé par ses gènes”; que pensez-vous de l’article 2 de la DUGHDH qui stipule que “chaque individu a droit au respect de sa dignité et de ses droits quelles que soient ses caractéristiques génétiques”? Qu’entendez-vous par dignité humaine? Le respect de la dignité humaine impose-t-il que l’homme soit reconnu en tant que sujet et ne saurait être traité en tant qu’objet par la science?


Voilà l’introduction
Il n’y aura jamais de suite pour des raisons de désaccords politiques

Science, Psychanalyse et Ethique
le 01/01/2000



L’accueil d’un nouveau-né dans une société humaine est porté par des règles, des rites qui l’introduisent dans l’ordre culturel. Le nouveau-né prend ainsi place dans le corps social. Implicitement s’opèrent une reconnaissance et une identification humaine primordiales de celui qui vient au monde : quelqu’un existe.
Le nouveau-né est plus qu’un simple être vivant, un plus qui lui donne “une valeur intrinsèque” : une singularisation dans le monde du vivant, c’est-à-dire une dignité humaine primordiale qui est indissociable du devenir-sujet. Le nouveau-né est un être singulier, animé par le désir de vivre, d’exister, porté par un désir de Soi : processus continu de subjectivation qui fait l’humain, un devenir-sujet “infini”, jamais acquis, car inscrit dans le temps. Toujours un “se faire-Soi” avec les autres en situation concrète : processus d’individuation de chaque être humain à l’opposé d’un processus d’objectivation.
La dignité humaine est, donc, une réalité première. On accueille le nouveau-né comme sujet à part entière.
Inscrit dans le lien social, il est l’héritier d’une histoire familiale, mais aussi d’une histoire collective devenant ainsi responsable de l’héritage de la civilisation et de sa transmission.

L’accueil du nouveau-né est soutenu par le désir de donner vie à un autre être humain, et d’en soutenir la responsabilité. Et cela d’autant plus que le nouveau-né est dans une dépendance primordiale. Son droit d’exister, sa reconnaissance comme sujet reposent sur la “volonté éthique” d’autres humains.
L’accueil est une expérience éthique immédiate : une ouverture radicale à l’Altérité. Elle se fonde sur la reconnaissance d’autrui et de son désir de Soi. L’autre est un “je”, digne d’humanité autant que je le suis.
On peut alors parler d’une disposition intentionnelle éthique “primitive”, de l’ordre du sentiment immédiat.
Une éthique de l’humanité s’éprouve dans cette expérience radicale de l’Altérité. Elle transcende l’expérience finie, les conditions empiriques (barrières culturelles, croyances, conventions sociales, etc.) pour s’ouvrir sur l’infini du sujet.

Ce sentiment éthique vécu lors de cette expérience est sans rapport avec un idéal de conduite, c’est-à-dire une orientation des actes de l’homme en fonction d’une loi morale. Il n’impose, donc, aucune norme, aucun devoir. Il ne garantit aucun droit pour l’autre. Ce qui fait que ce sentiment primitif à l’égard d’autrui peut basculer de la sympathie à l’antipathie (la violence).
Ce sentiment est indépendant à la fois d’un relativisme culturel, et d’un droit naturel. En ce sens, il se caractérise, paradoxalement, par :
— son universalité : accueillir la dignité humaine d’autrui de manière absolue, sans condition. Il n’est soumis à aucune considération empirique relative aux caractéristiques génétiques, raciales, culturelles, etc. Il est, par là, un point d’appui pour une universalisation de l’Éthique au niveau de l’humanité, au-delà de l’enracinement des sujets dans des situations historico-sociales et culturelles.
— sa singularité : dans le sens où il n’y a pas de sujet universel mais des sujets singuliers.
Ainsi ce sentiment éthique immédiat est affranchi des lois et des devoirs. Il n’impose aucune régulation des actes. Il est le plus proche et le plus voilé, occulté, refoulé, tant par ce qui relève de l’histoire individuelle, que par ce qui relève des situations historico-sociales et politiques.

Cependant, ce sentiment éthique vécu nomme le Souverain Bien dans le nom donné au nouveau-né : la dignité humaine de quelqu’un et son devenir-sujet.
La dignité humaine est une vérité pour tous. L’éthique est, ainsi, une éthique de la vérité dont la visée essentielle est le processus, infini en droit, de subjectivation par rapport aux savoirs et pouvoirs établis — dimension de l’hétéronomie dont la tendance extrême est à l’objectivation du sujet singulier.
De ce fait, l’éthique porte un projet oeuvrant contre tout déni de l’Altérité constitutive de la dignité humaine, contre toute objectivation d’un Autre-humain, à savoir le dévalement du sujet en objet.

L’histoire des hommes montre que la dignité humaine peut se perdre, être trahie. On peut porter offense à ce Souverain Bien. Les pratiques technico-scientifiques, l’ordre des pouvoirs politiques, la logique économique peuvent mettre en souffrance le respect de la dignité humaine. L’individu devient, alors, objet possible d’instrumentalisations diverses, moyen et non fin. Au-delà de cette objectivation de l’individu, c’est la démocratie qui est visée.
D’où la nécessité de dispositifs institutionnels juridiques et politiques protégeant l’humain de certains effets de la réalité historico-sociale et politique. Puisqu’il peut être traité comme un objet par la science, trahi par les siens dans le respect de sa dignité humaine, jusqu’à la dépossession de Soi.

Freud dans Malaise dans la civilisation nous dit que la civilisation en demande trop au sujet. Ce trop, qui peut le perdre dans le monde contemporain, s’identifie à l’ordre mondial des nécessités économiques, à la logique des pouvoirs, aux progrès de la technique et de la science.
Ce trop nomme le Mal en cette fin de siècle : “céder sur le sujet, sur le respect de la dignité humaine”, en détournant une expression de J. Lacan.
“Céder sur le sujet”, mène, insidieusement, à traiter l’autre comme objet et, dans sa forme extrême, jusqu’à la dépossession de Soi, à être exclu de son humanité et de l’humanité. L’homme est, alors, dépossédé de ce qui lui est le plus propre : la mémoire de Soi.
L’objectivation du sujet s’apparente à une figure de la mort. On lui retire la “vie-de-Soi”. On le met dans un certain rapport à la “mort-de-Soi” : la souffrance, et la mise en souffrance.

Quel est le coût humain (sans nier l’importance des recherches scientifiques pour l’humanité) de certaines pratiques technico-scientifiques ?
À quelles conditions vais-je continuer à devenir-sujet ? Capable de penser, d’agir, d’aimer, capable de faire de la politique, de créer... dans la société.
Dans ce court espace de temps entre la naissance et la mort, quel Bien vaut pour l’homme ? Celui qui peut permettre d’accéder à la dignité humaine, soutient et restaure le sujet : ni souffrance, ni mise en souffrance de Soi.

L’histoire d’une vie humaine, l’existence, est inscrite dans la temporalité, mais, aussi, dans le champ des possibles d’une situation historico-sociale.
Une vie humaine est un processus continu, ouvert sur l’avenir, d’une multitude d’intégrations (psychologiques, culturelles et sociales) dans une unité subjective singulière et dynamique.
Faire subsister le sujet, respecter son autonomie, son intégrité biologique, physique et psychique, sa liberté, son bonheur de vivre avec les autres dans un mutuel respect est devenu un problème politique, qui prend une envergure extrême, entre autres, en raison des progrès fulgurants de la science. L’homme est un sujet et digne d’être humain depuis la nuit des temps car il est né d’un homme et d’une femme — don de vie, perpétué d’une époque à l’autre, maillon dans la chaîne des civilisations. Fait incontournable qui impose le respect devant la vie. Roc sur lequel s’arrête toute juridiction à la recherche d’un fondement de l’impératif catégorique de notre fin de siècle et du troisième millénaire : l’homme n’est pas un objet, il existe.

Stephan Chédri


vendredi 30 novembre 2007

pedibus Lisboa

Alain Dufour - Impressions portugaises*

L'étude majeure à laquelle se livra Lacan en 1958 et 1959 fut, cette année, le choix de l'Association Freudienne Internationale pour son séminaire d'été. L'impasse du désir et, son inévitable pendant, le désir de l'impasse aiguisèrent ainsi, toute une semaine, les réflexions, dans l'alternance et quelquefois l'intimité des langues lusitaniennes et françaises. Impasse dont C. Melman nous indiquait, dès le début de ces journées, qu'elle amena Lacan, avec celle encore de la Passe, à nouer en Boromée les nappes de l'apparence, de la lettre et du réel. Ce complexe brassage revêt des aspects inattendus aux yeux du promeneur qui voudra bien s'égarer dans les ruelles de Lisbonne ou dans celles de quelques autres villes du Portugal splendides et méconnues, ou encore à ceux du visiteur qui se laissera emporter par la contemplation des œuvres liturgiques si nombreuses .

Ainsi, au troisième étage du Museu de Arte Antiga de Lisbonne, figurent deux portraits de saints : Mathieu et Philippe (si ma mémoire ne me trompe pas). Réalisés au quinzième siècle par l'Ecole Portugaise, ces visages emblèmatiques ne manqueront pas de surprendre tant ils rompent avec les représentations qui les environnent pour la plupart édulcorées jusque dans l'horreur du martyr, de la décollation, de la crucifixion. En même temps ils complètent, en la révélant en son expression la plus ultime, la conjugaison, voilée ailleurs, du crime, de sa jouissance et de son apothéose sanctifiée. Ce sont deux cadres de taille modeste ; la touche y est précise sans cependant revêtir l'onctuosité photographique de certains maîtres hollandais, une rugosité persiste bien faite pour souligner la rudesse de ces visages. La bouche édentée s'ouvre sur un sourire pourtant carnivore, tandis que le regard brûlant, brillant, fixe sur le spectateur son appel mystique. Des deux toiles se dégagent cette force du désir où s'esquissent bête et ange, meurtre, sainteté et volupté. Férocité cannibale qui selon Patrick de Neuter, ouvrant la semaine, pourrait être qualifiée de féline quand elle lie les amants dans une fièvre commune de se consumer.

Quant à l'apparat, Lisboa ne s'est pas soumise au nivellement occidental dans le choix du simulacre. La ville et son peuple possèdent encore leurs signes propres pour la parade, le spectacle, le décor. Ainsi ces hommes qui dans une gesticulation inutile miment l'autorité policière dans le flot de la circulation ou ces serveurs, habillant les poissons qu'ils retournent sur le brasier d'un mouvement ostentatoire, soucieux d'un art superflu et modeste. Et l'on trouvera agréable, flânant à la découverte de ses sept collines, la discrétion de l'affichage publicitaire. Si du château Saint-Georges ou encore du Barro-Alto l'on contemple la ville, la nuit en contrebas, elle paraît bien peu lumineuse auprès d' autres villes d'Europe et de France. Les ténèbres sont creusées de rares reliefs de lumière pâle qui, de ces hauteurs, semblent bien incapables d'éclairer le passant. Pourtant s'y promenant les voies sont bien éclairées, serait- ce alors que les néons, si abondants dans tous les lieux du commerce citadin, en s'éteignant, ne seraient pas remplacés par ceux du diadème de la reine publicité ? Despote plus présent, tout de même, qu'à Evora où les habitants ont su conserver, préserver leur ville avec un tact qui n'exclut en rien le confort de la modernité. Il est possible d'y acquérir ordinateur ou voiture comme dans toute cité moderne, mais ces commerces invisibles vous seront indiqués par de menus bandeaux. Ils ne vous cacheront pas les noms de rues inscrits en italique épaisse et noire sur des faïences colorées d'une ocre pâle brisée de veines vertes. La technologie sophistiquée, ou non, est à sa place, effacée par ce qui compte pour l'œil du promeneur : façades blanches et leurs replis, leurs contours et leurs ombres composent pour son esprit le mélange intime du familier et du secret. Des rues que l'on peut connaître en s'y égarant, un espace à la taille d'une vie d'homme où gestes et discours paraissent d'une consistance tranquille que leur brièveté souligne encore. Tels ces hommes autour d'une fontaine au bavardage lent comme leurs regards, tels ces étudiants devant une librairie discutant l'index pointé sur les ouvrages peut-être restés précieux d'une suffisante rareté. Présence et domination respectée de la langue sur la chose, sensible aussi dans les égarements de ces effets : ainsi de cette accumulation de l'iconographie religieuse dans le musée de la cathédrale.

Retour à Lisbonne : la brutalité inventive du réel, enfin, fouille les rives du Tage. Là où en contrebas de la place du Commerce, quelques couples enlacés (fait très localisé à Lisbonne) et des touristes rares, égarés peut-être, s'attardent devant un curieux et plutôt répugnant spectacle. Leur vision se veut discrète, et ils ne s'amassent pas, comme ce gluant bouillonnement que l'on découvre bientôt, cherchant ce que la quête psalmodiée et fuyante de leur regard invite à chercher. Stagnant, dans une lutte silencieuse, contre le courant déversé par la ville une grande masse poissonneuse dévore les égouts.

Quelques dizaines de mètres plus loin l'eau regagne sa transparence et, des remous voraces, ne restent que les poses repues de cormorans satisfaits de leurs proies bien nourries. Dans le large et paisible estuaire du Tage de petits navires orangés croisent, sans cesse, absorbant le reflux des travailleurs en cette soirée illuminée de vent.


A. Dufour, Lundi 12 Septembre 1994



*Ndé : publié in "Bulletin de l'Association Freudienne" 1994

jeudi 29 novembre 2007

avec l' au du bain

Louis Friza - Au travers la baie vue ou la bonne aubaine

Des vieillards lubriques scrutent dans l'enclos intime la jolie baigneuse et la concupiscence y est soulignée par le contraste entre les protagonistes. Cette scène d'un épisode biblique a souvent été peint et par les plus célèbres : Rembrandt ou le Tintoret pour ne citer qu'eux.

Voici comment elle vient joliment illustrer les voies de l'Unbewust.

Il me faut de temps à autres utiliser un pseudonyme et parmi ceux retenus j'en ai privilégié un : Aubain.

J'ai cru d'abord avoir été guidé par une simple consonance que je trouvais plaisante.

Or en correspondance avec un ami, il me demande, après m'avoir confié la sienne, quelle identité je revêts pour échanger sur internet. Je lui révèle donc qu'il s'agit de "aubain...." suivi de quelques chiffres.

Il me fait alors remarquer que mon choix peut faire penser au célèbre tableau, exquise et pathétique mise en scène du désir : "Suzanne au bain ".

Aussitôt je lui réponds qu'il a visé au plus juste. En effet Suzanne est le prénom de ma mère.

Mais ce n'est pas tout.

Lorsque j'étais enfant notre médecin de famille, qui avait une réputation de coureur de jupons, achevait sa visite régulièrement sur une frivolité à l'adresse de ma mère plutôt agréable à voir : " Au revoir "Suzanne au bain " s'exclamait-il joyeusement.

Je ne saurais dire si ce souvenir m'était présent lorsque je m'arrêtais sur Aubain mais il est plus qu'amusant de constater que l'impertinence espiègle de mon correspondant ait ainsi fait mouche, lui qui ne savait rien de ma mère .

Mais il y a plus et pour achever cette petite dégustation il y a encore à savourer ceci.

Comme tout un chacun je connaissais l'expression : "une bonne aubaine" et j'en savais l'usage mais j'ignorais par contre, lorsque je crus l'inventer, que le mot aubain (ou aubin) existait. A l'occasion je consultai un dictionnaire éthymologique et en y recherchant le mot aubaine j'y découvris le mot "aubain" , désuet et moins connu, qui désignait dans l'ancien droit français un homme né en terre étrangère , et qui à ce titre devait se plier au droit d'aubaine du seigneur dont il dépendait.

Ici votre serviteur est absolument dans le cas de mériter cette appellation ! Au moins pour être né en terre étrangère et encore si vous le voulez bien vous régaler de l'aubaine de cette rencontre interstitielle.

Une petite morale de l'aventure dicte ce conseil : si vous voulez choisir un pseudonyme au hasard utilisez de préférence un moteur dédié à cet usage...il y en a un, par exemple, attaché au "trousseau" (réserve de codes et mots secrets) sur le système Os X d'Apple*.


Louis Friza


* Ndé : ceci n'est pas une pube, nom d'un peintre!

mercredi 28 novembre 2007

grains & graines

Louvain

Je ne sais pas si vous êtes allés voir ça aujourd'hui, (sans doute pas),

http://didierkuntz.blogspot.com/2007/11/la-poésie-urbaine-vous-la-fait-au-culot.html

toujours est-il qu'en cliquant sur le titre, ("la poésie urbaine, etc..."),

vous aboutissez à cela,

http://profile.myspace.com/index.cfm?fuseaction=user.viewprofile&friendID=188800039

et là franchement, vous qui vous intéressez à la clinique, à la folie et à Lacan, ne me dites pas que c'est l'ensemble vide? Vous connaissiez, en dehors de Bordeaux? Où j'ai photographié l'affiche sur un mur, il y a quelques jours ; je pensais sans doute à Lacan à ce moment, dans mes pensées latentes ; mais je n'imaginais pas que je trouverai, quelques jours après, par un moteur de recherche, la trace de cette manifestation à Bordeaux de l'homme à la cruche de Louvain, si l'on peut dire ainsi... Comment est-ce qu'un tel machin pourrait provoquer autre chose que de la fascination...?

Ce mot pour inaugurer la rubrique "un succès de l' Une-bévue" chez Buvard & Désencré.

Amicalement,

Didier Kuntz

nota bene : explicitement ici, le lien qui se trouve sous le titre "Louvain" :
http://parolesdesjours.free.fr/lacan.htm
et qui vous manquait tant, je le sais.

le lion et le temps

Stefan Chedri - L'existence dans la perspective de la détermination de l'Etre par le Temps



Notes de travail pour l'Intervention au séminaire

"Psychothérapie institutionnelle et pensée asiatique "

le 29-05-07


L'existence dans la perspective de la détermination de l'Etre par le Temps



Remarques préliminaires : la psychose dans l'approche pathoanalytique questionne l'existence :


L'Existence entendue comme Présence : Il y a, j'y suis, il y a de l'Un, je suis.

L'Un de la manifestation de la Présence c'est l'unité dynamique de la forme (gestaltung) et le régime de la forme c'est le pathique.

La gestaltung c'est la genèse du présent à tout moment donné

La psychose est une catastrophe existentielle : il en va de son être…


- Le psychotique est l'Existant pour lequel est en question son Etre : Une défaillance de la possibilité d'Exister, soit du "Un" de la Présence qui définit l'Existant ("Y'a de l'Un" )


- Comment peut-on Etre quand on a été et qu'on a à être, pour paraphraser Szondi : continuité d'existence, Un dans le mouvement du temps , pas dans le temps, mais la détermination de l'Un par le temps.


- La psychose est un trouble du rythme, du mouvement de mise en forme de l'existence en situation pathique dont le site est le corps et de la temporalité primordiale (= le rythme ? )

Mise en forme toujours reprise de l'Existant défini comme Présence, toujours à l'avant de soi en étant en soi

La consistance relève d'une logique qui renvoie à un mouvement de retrait qui "im-présente".



Dans la perspective du séminaire et d'un travail sur la psychose, le temps et le vide :

La question n'est plus pour nous être ou non-être, Un ou multiple…

Mais "Temps et vide" dans la constitution dynamique de l'Existence


Après un premier détour par "la psychose et le vide":

- Le processus à la base de la construction de l'existence, c'est la gestaltung laquelle donne forme au vide. C'est un processus qui n'en finit pas de mettre en forme le vide selon Jean Oury


La nécessité s'impose d'avancer sur la notion du vide à partir du temps dans son rapport à la gestaltung :


- Temporalité et Rythme : Le rythme est la mise en forme primordiale de l'existence (et, aussi, un processus toujours permanent de construction de l'existence,..), dimension de base du temps : cyclique, selon Schotte ( ? ), hors temps, selon Jean Oury (?)


La question du temps a déjà été présentée à partir de Husserl, la thèse de Heidegger et de Dôgen ("Uji "- être-temps).

Maintenant, nous reprenons de nouveau à partir de "Temps et être" (Heidegger)

Par la suite, nous articulerons plus précisément avec les penseurs asiatiques : de nouveau Dôgen sur la question du temps et Nagarjunâ pour la problématique du vide

Ensuite nous verrons du côté de la logique du paraître, de phénomènes, la logique poétique… Encore à déterminer (?)



Intervention du 29-05-07

Reprise libre de certaines réflexions et propositions théoriques de la Conférence du 31 janvier 1962 : Temps et Etre (Heidegger) dans le cadre de notre perspective sur la question du Temps dans la psychose (donc pas une présentation fidèle de la conférence, pas l'objet, plutôt y trouver des pistes… Reprendre ce qui peut nous éclairer….)




La détermination de l'Etre par le Temps :


Le renversement des termes ("Etre et Temps") rend la question "plus questionnante" et "plus étrangère à la pensée de l'époque actuelle" .


Qu'est-ce que signifie "plus questionnante" :

  • plus étrange, hors toute prétention d'approche rationnelle, d'une compréhension ou intelligibilité immédiate

  • Un questionnement très loin de nos préoccupations quotidiennes

  • Une mise "en cause" des discours rationnels, techniques, scientifiques etc.… Mise en cause qui ne les annule pas, ne les dénonce pas comme "faux "


Il s'agit de prendre au sérieux la question, mais on n'a pas les outils intellectuels.

Alors on passe par la déconstruction onto-théologique, la critique des cadres de pensée rationnelle, métaphysique….


Donc "plus questionnante " c'est trouver le chemin dans la question, renoncer à comprendre pour entendre une pensée inouïe


Une pensée qui médite d'où, par ex. la théorie quantique, la poésie, la peinture etc. reçoivent leur détermination,


Et des méditations fort éloignées de nos préoccupations, de réflexions ou de nos cadres de pensée commune.


Donc "plus questionnante ", c'est suivre une démarche qui montre, accompagne une méditation.

Mais peut être pas trop, encore, se fixer sur les énoncés et leur contenu comme des certitudes ou un discours de savoir ….


La question : "D'où, la détermination ? "


- Déjà : "le Temps" est mis en avant, non plus l'Etre, c'est à méditer

- Penser l'Etre à partir du Temps et non partir d'une fondation de l'étant, "sans égard pour une fondation de l'étant"

Le plus difficile, évidemment c'est penser l'Etre sans l'étant :

Mais on a affaire à quoi ? s'il y a déconstruction onto-théologique


La mise en avant du Temps, pour avancer sur cette proposition : mais alors


"Quoi du Temps ?" si ce n'est pas "l'Etre ",

Premier, avant l'être ? mettre le temps en premier dans cette démarche n'est pas reculer vers un premier fondement substantiel plus profond, originel. Ça n'a pas de sens dans cette démarche

Le temps est peut-être une façon de réfléchir à la question de l'Etre après la métaphysique, une pensée de l'être possible avec tous ses paradoxes.

En tout cas un chemin…. Le temps vers la question de l'être, et du rapport de l'existant à l'être et plus loin au temps ?


On va vers une méditation sur "l'être en tant que non-être et du non-être en tant qu'être " , proposition à tenir ensemble, à ne pas dissocier; premier dualisme dépasser. Mais quoi en dire ?

Mais aussi ce qu'on nomme "non-être et être" à repenser :


Et méditer sur " ce qui " "porte l'homme jusqu'à ce qu'ici se nommait "Etre"


À savoir maintenant

"Ce qui ? " porte l'Existant à la question du Temps :


Nouvelle méditation sur ce qui tient et détermine le rapport de l'Existant (homme) au Temps comme détermination de l'Etre ?


La question est posée par lui. Son rapport à l'Etre est à reprendre dans la relation au temps en le définissant : l'Existant comme "Etre-temps et Temps-être " d'un seul tenant ?


Quoi de l'Existant quand l'Etre qu'il questionne se détermine du temps ?

Comment peut-il se poser la question. d'où l'entend-t-il ?

Une question légitime ou un "délire mystique " ?


La nécessité de cette méditation d'où la reçoit-il ? de son être-Existant ? ou "Existant-être" ? De l'être ? Mais si le temps détermine l'être ?

Une question qui ne peut être posé que par un vivant et plus qu'un vivant , un Existant soit un parlêtre, pris dans la dimension pathique …..


Être et temps : détermination réciproque

"Qu'est-ce qui donne l'occasion de nommer ensemble Temps et Etre ? "


J'ajouterai : "qu'est-ce qui donne l'occasion de poser la question de (nommer ensemble Temps et Être pour un Existant ?"

Qui pose la question, nomme, par quelle nécessité, d'où lui arrive la question ? où comment il y arrive ?


Penser l'Être au sens de Anwesen (parous€a) :

An – dans un mouvement d'approche, Wesen, déployer son être

En latin : prae –s-entia (praesentia, subsantif, = Présence, prae- préposition, devant, en avant )

Mais entendre verbalement "entia" comme "wesen" ,

alors Présence comme Anwesen, signifie : "venir-se-déployer-auprès de ",

parous€a en rapport avec le présent (présence)


" Présence " ce n'est pas le "présent" qui est restreint à une signification temporelle ontique


D'autre part l'Anwesen ne peut être pensé sans le jeu de Abwesen (absence)

ous€a (ce qui est , être en tant qu'existant, l'essence, être , substance ) parous€a - éparous€a


Approche de l'être : au génitif subjectif - sens de ce cas en lien avec le verbal

Génitif subjectif : l’agent accomplit une action. Le complément de nom est sujet, si l'on exprimait l'idée à l'aide d'un verbe


Génitif objectif : l’objet d’une action réalisée par le sujet. Le complément de nom est complément d'objet, si l'on exprimait l'idée à l'aide d'un verbe


Il peut être difficile de différencier ces deux types :

Ex. "Victoria romanorum" où le génitif est subjectif si les Romains ont gagné, mais objectif si c’est quelqu’un d’autre qui les a

vaincus.)


Ce qui exprime une activité verbale où le déterminant :

  • a la fonction d’agent = génitif subjectif

  • ou de complément = génitif objectif


Le génitif subjectif et le génitif objectif différant donc seulement en ce qui concernent la direction de l’influence – acteur ou patient.


L'aspect verbal (dans la méditation sur l'être comme Anwesen ) va donc être déterminant : mouvement, processus, dynamique etc. pas de chosification, d'entité stable … d' En soi permanent

On va donc vers un questionnement verbal de la notion "Etre" et par là de l'Existant qui nomme la question

Être ne peut pas relever du verbal et l'Existant être un nominatif, il en serait alors le fondement suprême, alors qu'il est à penser son rapport à l'être et le temps

Existant à un lien privilégié avec le temps comme son propre : dans la mesure où il questionne le temps comme son propre et le propre de l'être indépendamment de l'étant

Penser le propre de l'être sans égard au monde ontique. Pas le négliger, mais ne pas partir de l'étant pour le fonder et s'éloigner de ce qu'on peut entendre pas Etre maintenant dans la nécessité de nommer le Temps pour y entendre quelque chose …..

Pour cela c'est un génitif subjectif, on n'approche pas l'être de l'extérieur comme un objet … Pas de l'ordre de la possession objective, mais une relation" propre" interne ", l'approche lui appartient en propre

Déjà pas de méthode extérieure, de technique scientifique etc. d'expérience de cet ordre pour méditer l'Etre (pas une chose parmi les étants)


Anwesen et présent :

Heidegger va sur la piste de ce que dit "présent" dans "Anwesen"

Le présent dans la représentation courante forme avec le passé et le futur ce qui caractérise le temps.

Avec le génitif subjectif et l'aspect verbal dans "Anwesen" : il nous dit

"Être, en tant qu'avancée de l'être, est déterminé par le temps"

"Approche de l'être": ce n'est plus un entité stable, fondatrice, permanente, un En-soi. On a comme une désubstantification de l'être, d'un réel plus réel, derrière les étants; mais on gagne une dynamique, un processus (approche de… Avancée.. La perspective change, et demande de se questionner sur le rapport au temps.

Avancée de... la préposition "de " introduit un génitif subjectif, mais quoi de l'agent, l'Etre ?

Et quoi du Temps à ce niveau ontologique ? Temps de l'Etre ?


Donc le rapport de l'Etre, comme avancée, aux réalités ontiques n'est plus un rapport de fondation.

Quoi du rapport ? car il n'y a pas d'étant sans Etre (déterminé le Temps )


Anwesen : dit le présent et le présent s'articule au passé et futur


Écueil : on va de l'Etre au Temps comme sa détermination : dans quelle mesure il y a détermination par le Temps, en quoi ?

Temps : un réel plus réel que l'Etre ?

Et

Quoi légitime de parler de l'être comme temps ?


"D'où parle dans l'Etre quelque chose de tel que le Temps".

En raison de quoi ? en quelle modalité ?


Pour avancer, il faut sortir des représentations banales du temps pour penser le rapport : Temps et Etre

(Et la différence ontologique : Etre et Etant)


Que disons nous quand nous référons au Temps :

  • Chaque chose, étant, à son temps propre. L'étant va-et-vient, demeure un certain temps etc.… Donc chaque étant est dans le temps.


Mais ça peut-on le dire de l'Etre ? l'Etre n'est pas un étant ayant son temps propre dans le temps. L'Etre n'est pas dans le temps, il est déterminé par le temps.

L'être ne se rencontre pas comme un étant parmi les étants,


Alors Heidegger va à cette conséquence : "l'Etre est-il ?"


(Heidegger prend un exemple : auditorium est éclairé, et l'auditorium éclairé nous le reconnaissons comme quelque chose d'étant.

Mais nous dit-il , où dans l'auditorium trouvons-nous le "est" ?

Nulle part parmi les étants ou les choses)


Conclusions provisoires :

- L'Etre n'est pas dans le temps car ce n'est pas une chose ou un étant

Mais sans quoi rien d'étant n'est

- L'Etre en tant que "mouvement d'approche de l'Etre", (verbal pas nominatif) présent, est déterminé par le Temps, par ce qui tient au Temps "


Pour avancer sur la question du temps Heidegger compare

- "Ce qui est dans le temps (l'étant) " et déterminé par le temps et selon quelle modalité

Ce qui est dans le temps, c'est le temporel : le transitoire, ce qui dans le cours du temps passe, ce qui périt avec le temps.


À ce moment pour passer de "dans le temps " à la détermination par le Temps et l'Etre :

- Il remarque que le temps lui-même passe mais en tant que passant constamment il demeure en tant que temps


Ainsi, il demeure et pour Heidegger, demeurer signifie ne pas s'évanouir


et là, il revient à ce qui était posé par étymologie au départ : avancée-de-l'Etre , mouvement d'approche qu'est l'entrée dans la Présence


Apparaît un paradoxe :

  • Si le Temps demeure parce qu'il est "mouvement d'approche de l'Etre dans la présence"… Alors le Temps est déterminé par un être ? !

  • Comment l'Etre peut-il continué d'être déterminé par le Temps ?


Cette constance avec laquelle le temps passe : c'est de l'ordre de l'Etre (?)

Être et constance ça va ensemble

Et pourtant nulle part dit-il naïvement nous ne trouvons le Temps comme quelque chose d'étant


On sent déjà, il me semble que le problème est de séparer être et temps (dualisme) pour ensuite penser la relation; mais d'autres questions surgiront, si on dépasse le dualisme : être-temps, temps-être, de quoi on parle ?

À voir avec Dôgen : Uji (être-temps) , pas de dualisme ?

Alors, le rapport de Uji aux étants dans le temps ? Selon quelles modalités ? Comment ? à voir avec la logique du paraître ?


Et l'on ne peut pas écarter l'Existant, celui qui parle le temps et l'être, en tant qu'il y est concerné dans sa consistance d'Existant comme Présence et non seulement d'étant


Alors pour l'Existant, un étant dans le temps ? mais aussi plus que cela, déterminé par le temps. Pas seulement une chose dans le temps car en rapport avec la question de l'être. Donc le rapport au temps de l'existant est fondamental dans sa constitution, rapport qui en fait un Existant, qui lui donne consistance et inscription dans le temps, qui peut mettre en cause son propre, son appropriation.

Comme Existant il tient et consiste d'une détermination par le temps mais non par le fait d'être dans le temps


Il a été dit que le Temps comme constant est déterminé par un Etre

Mais "Etre" n'est pas une chose, donc rien de temporel comme l'étant

Cependant

En tant qu'Etre-en-présence, l'Etre est déterminé par le temps !

Mais aussi

en tant qu'Avancée-de-l'être dans-la-présence : Etre détermine le temps !

On tient ces contradictions ensembles


Complexité de parler du temps en rapport à l'être ou de l'être en rapport au temps, à supposer qu'on doive les dissocier : pensée dualiste


Le temps détermine l'être, l'être détermine le temps ? !


Le Temps n'est pas une chose, pas un étant, comme l'Etre, nulle part nous ne trouvons le temps en tant que tel nous dit Heidegger


Le temps n'est pas dans le temps, mais le temps est de tel sorte qu'il y a dans le temps des étants

Quoi du "est de tel sorte ?" et quoi du "est" dans cette expression ?


"Mais dans son passer, il (le temps) demeure constant sans être lui-même quelque chose de temporel comme l'étant qui est dans le temps "


Heidegger conclu à ce moment avec toutes ses propositions contradictoires :

Être et temps se déterminent réciproquement mais de telle sorte que :

  • Être ne peut être déclaré temporel (pas une chose dans le temps)

  • Pas plus que le temps ne peut être déclaré étant (on ne le trouve nulle part comme constance)


Quoi dire de cette détermination réciproque "de telle sorte" ?

Le Temps a de la constance : Etre

Être est avancée-dans-la- présence : temps

Mais ni l'un, ni l'autre ne sont dans le temps, parmi les choses !


Si l'on parle de l'un on parle de l'autre, et réciproquement. Mais non sur le plan ontique, condition pour aller plus avant dans le questionnement. Donc ça se complique.

D'autant plus qu'il faut dépasser la pensée métaphysique et les cadres de la pensée rationnelle :

- Pas de préséance de l'un sur l'autre, pas de fondement dernier à penser à partir des étants

- Mais penser l'être en son propre, déterminé par le temps "de telle sorte"


Évidemment, pas de dialectique spéculative, aufhebung, une unité supérieure pour résoudre le problème : on n'entendrait pas le nouveau et retomberait dans des schémas classiques sans avancée dans la question, c'est une échappatoire : on n'entre pas dans la question de l'être comme tel, ni du temps comme tel, ni dans leur mutuelle relation


À partir de là, il est donc exclu de savoir :

Si la relation de l'être et du temps est un rapport qui se laisse construire pas la composition des deux (dualisme)

Ou bien

Si "Etre et Temps" nomment un seul tenant de la question, à partir de quoi résultent "Etre" et "Temps"

"Un seul tenant de la question" : on pense à Uji et Dôgen ; mais on doit écarter un monisme, une Unité supérieure qui se décline en deux pôles


Un seul tenant de la question

Heidegger continue dans cette voie :

La question "un seul tenant" que nomment "être et temps ", "temps et être" comment y accéder… S'y porter

Il propose d'aller avec prudence, juste suivre les choses médativement, sans recouvrir de représentations intriqués


Mais il reprend, "Être, Temps" :

Peut-on les suivre comme des choses ? les choses en question.

Il exclut cette possibilité si "chose" en question signifie "quelque chose d'étant".


"Eine Sache" : le mot qu'utilisera Heidegger, signifiant quelque chose dont il est question de manière éminente, c'est-à-dire où s'y héberge quelque chose d'impossible à éluder.


"Le cas d'un litige, ce qui est ainsi en question "

Donc c'est traduit par "question" pour faire référence à" la mise en question véritable",

Ce qui met en cause un véritable différend, dans la mesure ou c'est le différend lui-même qui ouvre l'espace pour la question ;

Usage juridique : "une question", là il s'agit d'un tout où il y a matière à débat


Frage: traduit habituellement par " question" est loin de ce sens.


Il pose donc à partir du sens de "Sache" :


Être, une question, la question de la pensée

Temps, une question, la question de la pensée


Ces précisions montre déjà que ce n'est pas un ob-jet, op-posé, au devant de la pensée, mais plus

Pas un étant pour la pensée rationnelle, mais quelque chose qui met en cause, en débat de manière éminente la pensée sans qu'elle puisse l'éluder, la chose (Sache) de la pensée, la pensée d' un Existant : pensée-temps-être d'un seul tenant ?

Donc, le Temps : la question de la pensée si tant est que l'être comme parous€a dit quelque chose telle que le temps

Puisque le point de départ est la pensée de l'être et qu'il nous mène à quelque chose telle que le temps


Alors, l'Etre à avoir avec le Temps


"Être et temps"," temps et être" : nomment la relation qui retient les deux questions, le tenant de la question, qui tient l'une à l'autre les deux questions et soutient leur relation


Donc suivre ce tenant de la question en le méditant : ce qui tient et ouvre le temps et l'être;

Le tenant de la question ; "la chose –Sache- de la pensée telle que définit plus haut


Être, une question mais rien d'étant

Temps, une question mais rien de temporel, (ce qui voudrait dire qu'il est comme un étant dans le temps et donc périt, mais le temps est constant)


Ce qui amène l'impossibilité de dire du Temps ou de l'Etre : "il est"

Comme on peut le dire de l'étant, par ex: "la chaise est "


Par contre on peut dire :

Il y a Etre et il y a Temps


C'est le minimum que l'on puisse dire pour parler de ces deux questions et se dégager de l'ontique : il est.

L'ontique signe qu'il y a de "l'être et du temps" pour qu'il soit.

On pose la question de l'être pour les étants mais, pour avancer sur la question de l'être, on doit dépasser l'ontique, et ne pas redoubler l'être sur lui-même; "l'être est", le posant ainsi parmi les étants , alors qu'il signe que l'étant est;

"Être est" implique alors" l'être de l'être"; et ensuite " l'être de l'être est" alors l'être de l'être de l'être …)


Il y a = Es gibt

geben : racine indo-européenne qui a donné le latin" habere"

Es gibt : la traduction : "donner" va un peu trop loin. Plutôt tenter d'entendre le "habere" latin avec "geben" pour sentir dans le "il y a " ce que veut dire " avoir" : plus proche de tenir que posséder

(Dans la langue : tenez, lorsqu'on donne, donation)


(Existence = Il y a, j'y suis, il y a de l'Un, je suis. Tenir et consister l'Existant comme Un déterminé par le temps ? )


Reprenons :

Ce que veut dire Etre = il y a

Ce que veut dire Temps = il y a

Mais Heidegger va encore plus loin et interroge ce Il qui donne" être et temps "

On passe du "il est" à "il y a" au "Il "


Il et donner

On ne présuppose aucune entité, juste "il y a " comme un constat des choses en question.

Et pour penser le temps et l'être en leur propre, c'est-à-dire non partir de l'étant, on en arrive à : Il qui donne ; ça se manifeste, ça donne, ça vient ….

Sans trop savoir d'où, mais voir peut-être comment

Ne pas chercher à arriver à une proposition dernière ultime et métaphysique : suivre les choses telles quelles


On passe du "quoi" au "comment" :

En suivant ce chemin à partir du" Il" se montre la manière dont :

  • Il y a être

  • Il y a temps


Comment est à déterminer le "donner " : Le tenant de la question , die Sache

"Donner" est "le tenant de la "Sache"", la chose en question qui tient d'abord les deux l'un à l'autre et les obtient comme résultat de la donation


On peut s'interroger sur "ce tenant": ce qui tient quoi , comment et où Il tient ?


Il n'y a pas deux entités, "être" d'un côté, "temps" de l'autre, pris dans "le tenant de la question"; on ne peut rien dire du temps et l'être, juste une question

Donc pas deux entités tenues par un troisième terme (entité) nommé le tenant qui les libère et les donne.

Pas de cette ordre-là, on peut écarter, ça ne collerait pas avec la méditation de Heidegger, on ajoute seulement un 3e terme suprême.

On a juste :

  • un tenir qui nomme un rapport, une dynamique, mouvement qui se révèle sur le plan ontique comme temps et être ….

  • La Chose en question, le tenant de la question à quoi renvoie "être et temps" sans qu'ils y soient présupposés en tant que tel.

Et pourtant en vient ( résulte, produit, donné) "être" et "temps"

Être

Pour le penser lui-même en son propre

Tout étant est signe de l'Etre, pas d'étant sans tenir à l'être (et au temps)


Ce qui concerne, évidemment, aussi l'étant par excellence : l'Existant

Qui tient à l'être et au temps et donc au "il y a" et au "Il" (à la donation )


Etre = Anwesen : approche-de-l'être, déploiement-dans-la-présence

être parle, nomme le temps : laisser-se-déployer-dans-la présence

( Anwesen : perspective dynamique comme présentation de l'être)


Être signe l'étant et est déploiement dans la présence

Donc

Si on part d'un étant qui est avancée-dans-la-présence,

Alors quel est le rapport de l'être à l'étant , à l'ontique en général ?

l'avancée-du-déploiement de l'être fait apparition au niveau de l'étant, comme un "laisser-se-déployer-dans-la-présence"

Et le rapport de l'être à l'Existant comme Présence ?


Pas un rapport de fondation mais faire apparaître, manifester dans la Présence , quelque chose plutôt que rien , ça arrive….


Alors

Penser en propre ce laisser-se-déploiement-dans-la-présence

Dire la mesure dans laquelle est donné lieu au déploiement-en-présence


"Donner lieu" : laisser-être le déploiement de l'être, ce qui laisse apparaître ce qui lui est en propre : "le non retrait "


Non-retrait : libérer du retrait, porter à l'Ouvert

Dans le "libérer du retrait" joue un donner , celui qui dans le laisser-se déployer-l'être donne le déploiement, c'est-à-dire l'être


On en est au "Il" et au "donner" dans la méditation :

À ce moment, Heidegger reconnaît que le :

  • Donner

  • Et le "Cela qui donne" , le "Il" de il y a


Sont tous les deux obscurs…

Mais on arrive à cette position parce qu'on se dégage de la métaphysique , onto-théologie ( ne pas penser l'être à partir de l'étant et comme fond de l'étant)

Pourtant l'étant par sa présence signe l'être, donc un autre rapport à questionner : la donation


Penser l'être en propre, (non à partir de l'étant, hypostasier un étant parmi d'autre) demande que soit abandonné l'être comme fond de l'étant.

On passe de l'idée de fond de l'étant au " Il y a " ; au donner qui joue en retrait dans la libération du retrait


Être est la donation de cet "Il y a" et à sa place dans le donner, en tant que donation. L'être n'est pas repoussé hors du donner (sinon il n'y aurait pas d'étant présent).

Il se déploie en présence et devient tout autre et en tant que laisser-se-déployer en-présence, il a sa place dans la libération hors du retrait (l'étant est…)


Mais en tant que don de cette libération, l'être reste retenu dans le donner

Retenu car pas donner comme un objet, poser là dans l'ontique

retenu dans le donner mais pas comme une entité dans une boîte

Quoi de l'être dans le donner ?


La conclusion qui s'impose :

L'être n'est pas.

De l'être Il y a en tant que libération, hors du retrait, d'un déploiement-en-présence


Il y a , Donner , Donation


La penser du donner impose un changement de perspective de ce que l'on nomme être en philosophie (critique de la métaphysique)

le dire du donner : comment dire " temps et être" ?

On s'écarte dans cette nouvelle perspective de la proposition "sujet –copule-prédicat", avec l'être comme sujet-agent;

Le Il y a en tant que donner laisse entendre que l'Etre n'est pas plus un prédicat, il "est" donné et retenu dans le donner; ce qui n'est pas le statut d'un prédicat.

Et le "donner" n'est pas le déploiement d'attributs essentiels de "l'agent-sujet, substance, En soi, Un… "

Etre : ni sujet, ni prédicat


Parménide dit : ¶sti gar eÂnai, "il est a vrai dire être "

Tant que nous disons qu'Il est, cela nous-même à le représenter comme quelque chose d'étant, mais il n'est rien d'étant ….

Au début l'être est bien pensé, mais non le Il y a , en retrait dans le ¶sti .

le Il y a reste non-pensé


Donc suivre en méditant ce changement de perspective :

- L'être est pensé au sens de Anwesen : déploiement-en-approche-qui-est Présence


Absence et Etre :

ab-sence : se déployer en éloignement

Symétrique de l'Anwesen

L'ampleur de portée du déploiement-en-présence-de-l'être se montre de la façon la plus pressante si on médite sur l'absence

Absence : et précisément elle, reste déterminée par un déploiement-en-présence- de-l'être parfois plus élevé, à la plus haute puissance de l'inhabituel


Absence comparer à d'autres notions : rien, vide, manque etc.… À méditer ? on sort d'un dualisme trop simple présence-absence ….


Le donner qui ne donne que sa donation (être est retenu dans le donner ? ) et se donnant se retient et se soustrait Heidegger le nomme : destiner

L'être qu'Il y a est bien le destiné dans chacun de ses changements

L'historique de l'être se détermine à partir du caractère destinal d'une destination, non à partir d'un "cours de l'histoire" :

  • Aussi bien "le destiner" que le "Il" qui destine contiennent et retiennent leur propre manifestation


Enigmantique : le verbal =" destiner" , le"Il", part d'ombre…. Qui ne s'épuisent pas dans cette destination et pourtant y est tout entier … ?


Le trait fondamental du destiner : faire halte et se retenir en faveur de la perceptibilité de la donation en faveur de la manifestation de l'être.


À partir du "Il y a être" ; le donner du "Il y a " s'est montré comme destiner



Temps

Pour le penser lui-même en son propre


Rappel :

- Le tenant de la question "temps et être" fait signe que l'être en tant qu' oÊsia entendu comme Présence (Anwesenheit – être-entré-en-présence) "est" marqué dans un sens non encore déterminé par une caractéristique temporelle et donc par le temps

- L'Existant est entendu dans un nouveau sens à reprendre à partir de "temps et être" : la question de l'être de l'existant devient la question du temps de l'existant

Poser ce qui est le tenant de la question (Sache), c'est poser ce qui tient l'existant, c'est référer à son être dans cette nouvelle perspective de "Temps et Etre"


L'existant comme Présence signe de l'Anwesenheit est entendu comme "Etre-temps" et "temps-etre".

Poser la question de son être, c'est médité sur ce qui lui permet de s'inscrire dans le temporel à partir d'une approche du temps non commune, ce qui déploie l'Existant en Présence pour déjà qu'il puisse être là (Présence) mais aussi présent-à-la-Présence , pour avoir un temps parmi les autres

Pour que l'Existant consiste et tient (continuité d'exister) , "Il y a" qui fait qu'on se situe :

  • Dans l'avant et l'après, en articulation interne (Permanence et continuité de vie de l'existante, innere Lebensgeschichte)

  • Et non se situer de l'extérieur (d'un maintenant à un maintenant, chacun s'évanouissant sans lien interne, extérieur l'un à l'autre , aüssere Lebensgeschichte).


Être dans le temps ne s'apprend pas comme apprendre à lire le calendrier, une montre, les psychotiques le savent


Comment penser le Il qui donne être ? destine …

Le pas est facile de présumer que le Il, qui donne l'être, qui détermine l'être comme approche-de-l'être et comme laisser-l'être-se-déployer-en-présence pourrait être : le temps

"Il" n'est pas le temps


Le temps nous est connu par des représentations courantes comme l'être mais cela fait que c'est aussi non-connus dés qu'on veut situer le propre du temps


Heidegger reprend à partir du propre de l'être :

le Il y a, le donner, le destiner , le propre de l'être n'est rien du genre de l'être etc.…

De là il s'attend à ce que le propre du temps ne se laisse plus déterminer à l'aide de la caractéristique courante du temps

Le rapprochement de "temps et être" invite, à partir de ce qui a été dit de l'être à situer le temps dans ce qui lui est propre.


Ce que nomme présent à partir de ce que veut dire être et de son rapprochement au temps ?

Être = avancée-de-l'être, se-déployer-en-présence, laisser-se-déployer-en présence, être présent, parous€a


Quoi, Le présent ?

Quand on le nomme on pense "avenir", "passé", "antérieur" et "ultérieur" par rapport au" maintenant"

Seulement le présent comme maintenant n'est pas le présent de l'être-présent, parous€a

Et cependant il faut caractériser le temps à partir du présent

On comprend le présent comme maintenant par rapport au

non-plus-maintenant du passé et au pas-encore-maintenant du futur

Mais Présent = aussi l'être-présent , parous€a, se déployer-en-présence , Anwesenheit


Néanmoins, il précise que nous n'avons pas l'habitude de déterminer le propre du temps à partir du regard porté sur la présence au sens d' oÊsia


C'est bien plutôt le temps comme "unité présent-passé-futur" qui est représenté à partir du maintenant

Aristote dit : ce qui du temps est avance en se déployant, c'est le maintenant de chaque fois. Passé et futur = mØ ˆn ti, quelque chose de non étant


Le temps n'est pas quelque chose de simplement nul, un pur néant, mais quelque chose qui avance bien en se déployant : un prae-s-ens

Donc quelque chose qui avance bien en se déployant, mais à quoi quelque chose fait défaut : le ne-plus et le-pas-encore, tous deux se réfèrent au maintenant


Dans cette vision : le temps = succession des maintenants, à peine nommé, s'évanouissant dans le moment d'avant et déjà chasser par le moment d'après

C'est le temps du calcul et de la mesure, de la montre etc.


On dit "maintenant " et on a dans l'esprit le temps, mais nulle part en dehors de la montre qui nous donne l'heure nous ne trouvons le temps , ni sur le cadran , ni dans le mouvement , nous dit Heidegger

Alors

Où est le temps ? est-il même et a-t-il un lieu ?

Il est évident que le temps n'est pas rien

Donc

Il y a temps

Pour avancer , Heidegger se porte sur la question de l'être pour voir ce qui s'y montre comme temps, Etre-déployé-en présence au sens de Présence :

  • La Présence au sens de l'être-déployé n'a rien à voir avec la Présence entendu au sens du maintenant

  • la Présence (en tant que déployé-en-Présence) ne se laisse en aucune façon déterminer à partir du présent comme maintenant


C'est l'inverse qui paraît possible ( cf. "Etre et Temps" § 81).

Donc

La Présence n'est pas le présent ou la présence au sens du maintenant

Le maintenant (au sens courant de présence, présent) est déterminé par la Présence.


La Présence n'est pas le maintenant, c'est à mettre en relation avec la question de l'existant comme Présence… Être à l'avant de soi … Déterminé par le temps ou plutôt" être-temps" d'un seul tenant)


Alors c'est la Présence, parous€a, et tout ce qui appartient à un tel présent qui devrait se nommer le temps

Même si cela n'a plus rien à voir avec la représentation courante du temps (montre, calculable etc.)


Quoi de la Présence ?

Heidegger signale que, jusqu'ici, il s'est dispensé de préciser ce que veut dire :

Présence au sens de parous€a

L'être est unitairement déterminé comme :

  • Avancée-du-déploiement

Et

  • Laisser-se-déployer une telle approche

Autrement dit comme libération hors du retrait

Il continue à partir du sens de Anwesen pour nommer le temps en propre par rapport à l'être :

- Wesen : déployer son être veut dire Währen (durer) : être comme manere (persister…)


Il met en garde de ne pas de ne pas prendre Währen comme pur et simple durer au sens courant du temps (de maintenant en maintenant …)

Parler de l'être comme ce qui se-déploie-en-s'avançant (Anwesen) exige que nous entendions dans le Währen (manere comme Anwähren) : venir, avancer-dans-la permanence)

Que nous y entendions le Weilen et Verweilen (séjourner) : avoir quiétude, avoir séjour

L'avancée-du-déploiement de l'être s'avance en venant à nous, et ce venir à nous importe, nous regarde

( "an" du Anwesen : approche , avancée, abord)


"Ce qui me regarde vient à moi" et cette approche est ce qui concerne essentiellement celui vers qui a lieu l'approche : l'Existant


Présence (Gegenwart) : cela veut dire venir séjourner à notre rencontre à nous les hommes, (Existants)

Existant

Homme/Existant et Présence

Heidegger note que tout ce qui a été déjà médité caractérise et signe l'homme (Existant)

La question est directe : Qui sommes-nous ?

L'homme (existant) concerné essentiellement:

  • Par la venue à lui de l'état de Présence

  • Et qui, à partir de cette venue à lui, déploie sa propre Présence

  • Et à sa manière vient lui-même à être pour tout ce qui entre en Présence et pour tout ce qui en sort


l'homme (l'existant) se tient au cœur de la venue à lui de la parous€a, de telle sorte qu'il s'ouvre pour accueillir l'avancée-du-déploiement : le Il y a – comme donation en prenant garde à ce qui fait apparition dans le laisser-avancer-dans-le déploiement.


Heidegger avance :

Ce qui permet d'articuler la question du temps et de l'être à l'existant

Si l'homme n'était pas constamment celui qui accueille la donation venant du Il y a, parous€a

Si ce qui dans la donation tendu vers lui ne l'atteignait pas, alors :

  • L'être resterait en retrait, mais surtout

  • L'homme resterait exclut de l'ampleur du règne du : Il y a être ; l'homme ne serait pas homme


(Ou l'homme serait psychotique ? à quelles conditions et comment pour l'existant se tenir au cœur de la Présence et s'ouvrir au " Il y a", accueillir la donation du Il y a ? L'existant est concerné essentiellement pas le temps : articulation "temporelle interne" , innere Lebensgeschichte = continuité d'existence…)


Il y a renvoi à l'homme/Existant pour penser le temps. Il semble qu'on s'écarte de la réflexion sur le temps dans ce qu'il a de propre.

En fait on est plus proche de la question qui se nomme "Temps" et qui doit se montrer à partir de la Présence (parous€a)


Donc

Quoi de la Présence entendu comme parous€a ?

parous€a = perpétuel-avoir-séjour dont la venue à lui regarde l'homme, qui l'atteint, qui lui est offerte

Alors d'où cet atteindre ? d'où ce règne qui s'étend et se tend (porrection, porriger) et dans lequel la présence en tant qu'approche-du-déploiement à sa place pour autant qu'il y a parous€a


Heidegger va refaire un détour par la notion d'absence selon le mode du" passé et du futur ".

Absence selon le mode du Passé et Futur

D'abord il remarque que l'homme reste toujours celui qui regarde la venue à lui de l'être de ce qui, en son temps, rentre dans la présence

sans qu'il porte une attention particulière à l'avancée elle-même de l'être

Mais

Perpétuellement l'absence vient à nous comme ce qui nous concerne essentiellement

"Passé "

  • Bien des choses ne se déploient plus à notre rencontre selon le mode de déploiement tel que nous le connaissons au sens de présence

  • Et cependant même ce qui n'est plus présent se déploie immédiatement à notre rencontre dans son absence : sur le mode de l'avoir-été en tant qu'être du passé qui comme tel vient à nous comme ce qui nous concerne


Cet être du passé ne s'abîme pas comme ce qui a simplement cessé d'être, hors du maintenant d'autrefois

L'avoir-été (en tant qu'être du passé) se déploie bien plutôt à notre rencontre sur un mode propre, c'est l'approche d'un être qui est procuré sur ce mode


"Futur"

mais l'Absence nous concerne au sens du non-encore-présent sur le mode du déploiement-venant à notre rencontre , venir sur nous de l'avenir

Absence en tant que déploiement à notre rencontre du non-encore-présent vient à nous et nous regarde déjà d'une certaine manière c'est-à-dire déploie de l'être tout aussi tout aussi immédiatement que l'être-passé

Dans l'a-venir, dans le venir-sur-nous, c'est l'approche d'un être qui est procurée.


La question de l'approche de l'être à partir de la méditation sur l'absence : la porrection ( tendre, présenter; porrection traduit reichen : porté d'un geste où quelque chose est procurée)

À partir de ce qui vient d'être dit l'absence (être passé ou avenir) est un mode d'approche de l'être et de venue à nous qui ne coïncide aucunement avec l'approche de l'être au sens de l'immédiate présence

Tout approche de l'être, prae-s-ence, n'est pas nécessairement présence ; étrange dit-il

Ce qui ne l'empêche pas de préciser que nous trouvons quand même une telle approche de l'être , à savoir la venue à nous qui nous regarde et nous atteint dans la présence: en elle aussi l'approche d'un être est procurée


Comment déterminer cette porrection d'être qui joue dans le présent, dans l'avoir-été et dans l'avenir ?

Cette porrection nous atteint parce qu'elle est en elle-même une porrection.

l'approche de ce qui survient en tant que non-encore-présent, apporte et produit du même coup ce qui n'est plus présent , l'avoir-été, et inversement ce dernier se procure l'avenir.

Le rapport réciproque des deux apporte, porte et produit en même temps le présent.

Problème :"En même temps " ? c'est-à-dire attribuant ainsi un caractère temporel à la mutuelle porrection qui porte les uns et les autres l'avenir, l'avoir-été et le présent, l'attribuant à leur unité propre.

L'unité qui vient d'être désigné, unité de la porrection qui porte et apporte c'est elle qu'il faut nommer : temps


Le temps n'est rien de temporel, ni quelque chose d'étant.

Donc impossible de dire que : "avenir, avoir-été et présent" sont donnés "en même temps" .

Cependant ils se portent les uns aux autres, leur propre porrection appartient à un seule ensemble. Leur unifiante unité ne peut se déterminer qu'à partir de ce qui leur est propre, à partir de ce qu'ils se portent les uns aux autres


Mais quoi donc se portent-ils les uns aux autres ?

Rien d'autre qu'eux-mêmes : l'avancée du déploiement d'être en eux procurée.


L'Ouvert

Ainsi, avec l'avancée du déploiement d'être s'éclaircit ce que Heidegger nomme : espace libre du temps (l'unité d'un état d'ouverture dans lequel aussi bien le temps et sa temporalisation ekstatique que l'espace et son espacement trouvent leur place)


Mais il précise qu'avec le mot "temps " il ne signifie plus une suite de maintenant.

Donc "l'espace libre du temps" n'est pas l'écart entre deux points instantanés dans le temps calculé.

"Espace libre du temps" nomme maintenant l'Ouvert, qui s'éclaircit dans la porrection qui porte et apporte les uns aux autres l'avenir, l'être-passé et le présent.


Seul l'Ouvert - et lui seul, pour, Heidegger – accorde à l'espace tel que nous le connaissons habituellement tout son espacement possible.L'éclaircissante porrection qui porte et apporte les uns aux autres l'avenir, l'être-passé et le présent est elle-même un pro-spatial : seulement ainsi elle peut accorder place à l'espace = le donner


Il reprend la critique de l'espace de temps mesuré, intervalle mesuré entre deux instants ponctuels etc.… Le temps représenté comme ligne et paramètre, temps unidimensionnelle, mesuré par les nombres.

Cette façon de penser le temps comme suite des maintenants est emprunté à la représentation de l'espace comme tridimensionnel


Avant tout calcul du temps et indépendamment de lui :

Le propre de "l'espace libre du temps", propre au temps véritable, repose dans la porrection qui porte et apporte les uns aux autres l'avenir, l'avoir-été, et le présent.


Penser à partir de cette porrection régissante à trois faces, le temps véritable s'avère être tridimensionnel;

Dimension à entendre comme tendre et s'étendre d'un bout à l'autre comme porrection éclaircissante : cela seule donne la possibilité de représenter et de délimiter un domaine de mesure.


L'avancé de l'être et le temps quadri-dimensionnel

Mais d'où se détermine l'unité des trois dimensions du temps véritable, c'est-à-dire l'unité des trois modes jouant les uns dans les autres de la porrection qui porte et apporte chaque fois une manière propre d'avancer dans l'être ?


Il remarque : dans le survenir du non-encore-présent, dans l'avoir-été de ce qui n'est plus présent et même dans le présent lui-même : chaque fois joue un genre d'afflux et d'apport : l'avancée de l'être

Cette avancée de l'être ne peut être assigné à l'une des trois dimensions du temps; l'unité des trois dimensions temporelles repose dans le jeu par lequel chacune se tient et se tend pour chacune.

Ce jeu de tension s'avère comme la véritable porrection , celle qui joue dans le propre du temps, donc en tant que telle comme la quatrième dimension.


Le "temps véritable" est quadri-dimensionnelle nommer quatrième mais première selon la question (Sache) c'est-à-dire la porrection qui détermine et accorde tout , "entre-prenante" porrection (proximité approchante) ou repose l'unité d'un "temps véritable."


Elle (porrection/proximité approchante) apporte dans le survenir, dans l'avoir-été, dans le présent, l'avancée de l'être qui chaque fois leur est propre. Elle les tient, faisant éclaircie, les uns hors des autres et les tient ainsi les uns pour les autres dans la proximité à partir de laquelle les trois dimensions restent rapportées (approchées) les unes des autres mais dans la mesure où :

- Elle libère et déploie un lointain ; car elle tient ouvert l'avoir-été tandis qu'elle empêche sa venue comme présente ;

- Elle tient ouvert le survenir depuis l'avenir en ce que dans le venir elle réserve la possibilité du présent


La proximité approchante (porrection) à le caractère de l'empêchement et de la réserve.

À l'avance elle tient les modes de la porrection d'avoir-été, d'avenir et de présent les uns pour les autres dans leur unité.


Donc :

- Le temps n'est pas, il y a le temps

- Le donner dont la donation obtient le temps se détermine depuis la proximité qui empêche et réserve.

- La donation procure l'Ouvert de "l'espace libre du temps" et sauvegarde ce qui demeure empêché dans l'avoir-été et ce qui dans le survenir demeure réservé.

- Le donner qui donne le temps véritable est nommé par Heidegger : la porrection éclaircissante-hébergeante

- Dans la mesure où le régir de cette porrection est lui-même un donner, il s'héberge dans le temps véritable le donner d'un donner.


Mais où y a-t-il le temps et l'espace libre du temps ?

Il n'y a pas de où, de lieu du temps (approche classique de la pensée)

Le temps véritable, la région de sa porrection triple (déterminé par la proximité approchante) c'est le site pro-spatial par lequel seulement :

il y a un possible "où ".

Le temps véritable est la proximité de déploiement d'être des trois dimensions, proximité qui unifie sa porrection triplement éclaircissante.


Le temps a déjà atteint son règne en l'homme de façon tel qu'il ne peut être homme/Existant qu'en se tenant au cœur de la triple porrection, ex-sis-tant la proximité, empêchement et réserve qui le détermine.


L'existant est déterminé, tient et consiste par le temps véritable tel qu'il est entendu


Il n'y a que le donner au sens de porrection : celle qui régit et éclaircit l'espace libre du temps : ouvert





L'énigmatique "Il "

Il y a temps

Il y a être


Le "Il " n'est pas une puissance indéterminée dont la tâche serait de mettre en œuvre toute la donation de l'être et du temps

Pour éviter cet écueil s'en tenir aux déterminations du donner à partir de

- L'être comme parous€a

- Et du temps comme région de la porrection de l'éclaircie d'une multiple avancée de l'être


Le donner se manifeste :

- Dans il y a être comme destiner et comme unité déterminante de toutes les destinations de parous€a

- Dans il y a le temps comme la porrection éclaircissante de la région quadridimensionnelle


Pour autant que dans l'être comme parous€a parle le temps , se renforce l'idée que le temps véritable, la quadruple porrection de l'Ouvert, se laisserait découvrir comme le Il qui donne l'être (avancée du déploiement) d'autant que l'absence même s'annonce comme un mode d'avancée du déploiement.


Ainsi le temps véritable fait-il apparition comme le Il.


Mais pour Heidegger le temps n'est pas le Il qui donne l'être.

Car le temps reste lui-même la donation d'un Il y a , dont le donner sauvegarde la région dans laquelle est procurée la parous€a

Ainsi, le Il reste énigmatique : il est prudent de déterminer cet Il qui donne à partir du donner comme destinement d'être et temps (porrection éclaircissante)


Cependant Heidegger garde en vue que le Il nomme une avancée d'absence.

Il remarque que dans ces phrases "il y a être, il y a temps" il ne s'agit pas d'énoncés sur l'étant. Mais que les énoncés sont pris, fixés dans la structure propositionnelle de la relation sujet-prédicat, ce qui fausse le "dire" du temps et de l'être.

Alors comment échapper à cette structure sujet-prédicat ? Juste porter regard sur le Il à partir du genre de donation qui lui appartient :

- Donation comme rassemblement de la destination (destiner du rassemblement de toute destination d'être)

- Donation comme porrection éclaircissante (porrection du temps)

Les deux y ont leur part ensemble la première reposant dans la seconde.


Ce qui se montre dans ce genre de donation est une propriation , une appropriation:

- À savoir de l'être comme parous€a

- Et du temps comme région de l'Ouvert

en leur propre


Ce qui détermine et accorde tous deux dans leur propre et dans leur convenance réciproque Heidegger le nomme Ereignis



Das Ereignis

Avènement, ce qui laisse advenir proprement jusqu'à soi

L'Ereignis ne se pense qu'à partir du regard sur l'être et le temps comme rassemblement de la destination et comme porrection

l'Ereignis :

  • c'est le "tenant de la question" encore indéterminé, le "et" de "temps et être

  • Ce qui laisse appartenir et convenir l'une à l'autre les deux questions (temps, être ), les rapporte à leur propriété, les sauvegarde dans leur coappartenance et les y maintient.


"Le tenant de la question" ne vient pas se plaquer sur l'être et le temps , mais le "tenant de la question" fait advenir d'abord l'être et le temps à leur propriété à partir de leur rapport et à travers l'appropriation qui s'héberge dans le rassemblement de la destination et dans la porrection éclaircissante.


Le Il s'atteste comme l'Ereignis


Heidegger note que cet énoncé est juste mais voile "le tenant de la question", car il considère qu'il se l'ait représenté comme quelque chose de présent, alors qu'il tente de penser l'être de la présence comme tel.


Qu'est-ce que l'Ereignis ?

Écueil, on n'interroge pas l'être de l'Ereignis

Car l'être lui-même à sa place dans l'Ereignis et reçoit de lui la détermination de parous€a


Comment l'Ereignis ne doit pas être pensé ?

Ce n'est pas ce qui arrive, ce qui se passe, l'événement

Le penser à partir de Eignen : faire advenir à soi-même en sa propriété comme éclaircie sauvegardante de la porrection et de la destination

Ereignis est tout autre qu'un événement

Ereignis des Seins : sans l'être aucun n'étant n'est capable d'être en tant que tel

Il considère que même ainsi parler de l'être comme Ereignis reste indéterminé


La philosophie a pensé l'être comme idée, volonté, maintenant comme Ereignis ?

Alors une détermination nouvelle dans la suite des interprétations de l'être, une continuation de la métaphysique ? Ereignis un mode de l'être ?


Non si au contraire on pense :

  • L'être au sens d'avancée dans la présence et de laisser-avancer dans la présence, qu'Il y a dans le rassemblement de la destination

  • Qui à son tour repose dans la porrection éclaircissante-hébergeante du temps véritable


Alors l'être a sa place dans le mouvement qui fait advenir à soi le propre.

De lui le "donner et sa donation" accueillent et reçoivent leur détermination


Alors, l 'être serait un mode de l'Ereignis et non l'Ereignis un mode de l'être ?


Problème pour Heidegger

La fuite qui cherche refuge dans un tel renversement est trop facile et passe à côté de la vraie pensée de la question et de son tenant.


Ereignis : n'est pas le concept suprême qui comprend tout et sous lequel être et temps se laisseraient ranger.

Les relations d'ordre logiques ne veulent rien dire : si on pense en quête de l'être lui-même et on suit ce qu'il a de propre alors il s'avère comme la donation accordée par la porrection du temps, du destinement de parous€a

La donation de présence est propriété de l'Ereignen

L'être s'évanouit dans l'Ereignis

Etre en tant que l'Ereignis : le "en tant" que signifie maintenant : être, laisser-entrer-en-présence destiné dans le faire advenir à soi – temps porrigé dans le faire advenir soi

Temps et être advenus à eux-mêmes dans l'appropriement


Peut-on en dire plus de l'Ereignis ?


Heidegger précise alors qu'au donner en tant que destiner appartient l'arrêt d'un suspendre : c'est-à-dire dans la porrection d'avoir-été et d'advenir jouent l'empêchement du présent et la réserve du présent.

Ce qui vient d'être nommé : suspension, empêchement, réserve manifeste quelque chose de tel qu'un se-soustraire : le retrait


Retrait qui doit appartenir au propre de l'appropriement , dans la mesure où les modes déterminés par lui de la donation (destination et porrection) reposent dans le mouvement de faire advenir à soi dans sa propriété


Il s'arrête là disant qu'expliquer que le retrait appartient au propre de l'appropriement n'est pas la tâche de cette conférence.



En conclusion

La destination dans le destinement de l'être a été caractérisée par une donation où ce qui destine s'arrête et se contient soi-même. Et dans cette suspension se retire, se dérobe à la déclosion


Dans le temps véritable et son espace libre pour le temps :

  • S'est manifestée la porrection de l'avoir-été, donc de ce qui n'est plus présent : l'empêchement portant sur le présent

  • S'est manifestée dans la porrection du futur donc du non-encore-présent : la réserve du présent


Empêchement et réserve montre le même trait que la suspension : le se- soustraire


Dans la mesure où le rassemblement de la destination repose dans la porrection du temps et où les deux ensemble repose dans l'Ereignis, s'annonce dans le faire advenir à soi cette propriété singulière que l'Ereignis soustrait à la déclosion sans limite ce qu'il a de plus propre.


À partir du faire advenir à soi , il se déproprie de soi-même

À l'Ereignis comme tel appartient le dépropriement

Par ce dernier, l'Ereignis ne se délaisse ni ne s'abandonne lui-même, mais au contraire sauvegarde ce qui lui est propre.


L'autre propriété singulière dans l'Ereignis : homme/existant et temps

Dans l'être comme approche du déploiement s'annonce et se manifeste la venue à nous les hommes qui nous concerne de telle sorte que dans l'entente et dans l'acceptation de cette venue à nous, on atteint ce qui distingue l'être-homme


Cette acceptation reprend dans l'entente la venue à nous de l'approche du déploiement et elle repose dans :

- L'insistance au cœur de la région que régit la porrection qui est la façon dont le temps véritable en sa quadri-dimensionalité nous atteints dans son règne.


Dans la mesure où il y a être et temps seulement dans l'appropriation (de l'être et du temps) à cette dernière appartient donc la propriété qu'elle porte à son propre l'homme en tant que celui qui entend l'être durant qu'il insiste au cœur du temps véritable


Ainsi rendu à ce qui lui est propre l'homme est à sa place et a sa part dans l'Ereignis.


Par lui l'homme est engagé dans l'Ereignis. A cela tient qu'on ne peut jamais poser l'Ereignis devant nous ni comme vis-à-vis , ni comme ce qui embrasse tout.

C'est pourquoi la pensée représentante et donatrice de raison ne répond pas plus à l'Ereignis que le dire énonciateur (structure propositionnelle sujet-prédicat)


Heidegger se demande si avec ce que dit : Ereignis on n'arrive pas à autre chose qu'un vain poème d'idées

Cela suppose le préjugé qu'on voudrait que l'Ereignis soit quelque chose d'étant


Cependant Ereignis n'est pas plus qu'il n'y a Ereignis


Que reste-t-il à dire ? rien que ceci l'Ereignis : l'appropriement approprie .


Il valait la peine pour Heidegger :

À travers le temps véritable de penser l'être jusqu'à ce qui lui est propre à partir de l'Ereignis, sans égard pour le trait qui porte l'être jusqu'à l'étant (sans égard pour la métaphysique )

Et de s'engager ensuite dans :

Une pensée en propre qui s'engage dans l'Ereignis afin de le dire, depuis lui-même et en direction de lui même

Mais une difficulté demeure : dire l'Ereignis en énoncés de propositions



A suivre……..

To be continued……


Stephan Chédri